Pajenn:Cadic J.-M. - En Est - 3 Er vedereah (Ataw) - RBV, 1890.djvu/6

Ar bajenn-mañ n’he deus ket ezhomm da vezañ adlennet.
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LA MOISSON

moissonneur, les sillons se couvrent d’épis dorés. Bientôt le blé du champ, naguère encore debout, est entièrement abattu.

Que c’est triste, que c’est désagréable de passer auprès d’un champ de blé qu’on vient de couper !

Vous n’entendrez plus, avec joie et avec bonheur, les épis mûrs résonner au souffle du vent.

Vous ne les verrez plus fièrement debout briller avec éclat sous les rayons du soleil, ni, comme autrefois, en inclinant la tête, se lever et se baisser ensemble, comme la vague dans la mer.

De cruels moissonneurs les ont abattus, et dans le champ ils sont tristement étendus sur chaque sillon.

Ainsi dans une guerre, on voit souvent avec douleur, au milieu d’une lande, les champs de bataille :

Ils sont tout couverts de soldats morts, fauchés sans pitié à la fleur de l’âge.

Tout-à-l’heure ils étaient encore si contents et si joyeux ! Ils ne songeaient qu’à la glorieuse victoire, et maintenant, ô chose triste et cruelle, ils sont étendus sans vie et glacés par la mort !


V


Cependant, après avoir coupé ses blés, personne ne les laisse bien longtemps étendus dans ses champs. Si la sécheresse persiste, si le lemps est toujours beau, chacun s’empresse de les ramasser et de les tramporter dans son aire à battre.

C’est pourquoi les moissonneurs, avant de pouvoir se délasser, doivent encore, pour terminer leur journée, mettre en gerbes le blé coupé.

Avec une poignée de paille, les uns font des liens qu’ils étendent sur un sillon ; les autres, par brassées, ramassent sur les sillons le blé coupé, et le déposent en rang sur chaque lien.

Un homme vigoureux (souvent le domestique de la maison), pour achever les gerbes el pour les lier, saisit chaque lien, tire sur les deux bouts, y appuie son genou, et serre fortement la gerbe.

Il y a des fermiers qui, au lieu de charroyer leur blé, dès qu’il