Pajenn:Cadic J.-M. - En Est - 4 En dornereah - RBV,1890.djvu/10

Ar bajenn-mañ n’he deus ket ezhomm da vezañ adlennet.
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LA MOISSON


Cependant on ne souge plus qu’à travailler, et chaque batteur a sa part dans le travail : l’un, monté sur le tas de blé, prend tour à tour les gerbes et les jette en bas ; d’autres les saisissent, brisent leurs liens, et les étendent sur l’aire.

Avant de commencer à battre, il vaut mieux laisser le blé étendu se chauffer un instant aux rayons du soleil. Car chez tous les peuples on a toujours dit que pour battre le blé, « il n’y a pas de meilleur batteur que le soleil. »

Pour se reposer chacun se retire à l’ombre. Les uns s’asseyent à terre, les autres sur des gerbes. Pour passer le temps, on raconte des histoires.

Mais les hommes pour fumer, ne Lardent pas à prendre, leurs pipes. Pour se procurer du feu, ils frappent avec le briquet sur un petit caillou : l’étincelle jaillit et allume la matière inflam­mable qui est renfermée dans un petit pot en bois ou en fer.

Tous alors prennent tour à tour le pot dans leurs mains, y allument leurs pipes, et bientôt on voiL un nuage de fumée qui s’élève vers le ciel.

Cependant, dès qu’ils ont fini de fumer, les batteurs s’apprêtent à battre le blé étendu, et saisissent leurs fléaux qu’on entend bientôt tomber en cadence sur l’aire à battre.

Personne ne dit plus mot; tous travaillent avec ardeur, sans songer ni à la fatigue ni à la chaleur excessive.

Tous sont ruisselants de sueur ; tous sont essoufflés ; mais on voit toujours les fléaux qui s’élèvent, tournent autour des têtes et tombent, en sifflant, sur la paille qu’ils tordent avec les épis.

De chaque épi jaillit aussitôt le grain qui se répand de tout côté. Tout le blé étendu sur l’aire est bientôt battu une première fois. Mais pour bien faire, il faut alors le retourner et le battre de nouveau. Ainsi faudra-t-il agir pendant la journée.

Cependant, quand tout ce blé est bien battu, quand on voit qu’il ne reste plus de grains dans les épis, on secoue la paille, on la réunit, puis, au moyen de fourches, on la transporte au loin pour en faire un grand tas. Mais pendant qu’on entasse ainsi la paille, la balle est recueillie et entassée à son tour.