Pajenn:Le Gonidec - Bibl Santel pe Levr ar Skritur Sakr, levr Iañ.djvu/14

Adlennet eo bet ar bajenn-mañ
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INTRODUCTION

pour leurs coutumes nationales les Français venus en Bretagne ou les Bretons infidèles à la langue du pays, et les efforts qu’ils faisaient pour les avilir, redoublèrent l’opiniâtreté que mirent les Bretons-bretonnants à les maintenir. La poésie populaire prêtait son appui constant aux sentiments patriotiques, en maudissant la vipère gauloise, éclose au nid de la colombe armoricaine. Toujours sur la brèche, elle continuait à jouer un grand rôle dans toutes les affaires du pays ; pas un événement de quelque importance qui ne fut annoncé, loué ou blâmé par les poëtes nationaux ; pas un sentiment dont ils ne se fissent l’organe dès sa naissance. Leurs chants, circulant rapidement de manoir en manoir, de bourgade en bourgade et de chaumière en chaumière, faisaient l’office de papiers publics ; et partout où la langue du berceau était celle de la famille, le peuple, regrettant les jours de son indépendance, répétait cet énergique refrain, qui devait être le cri de guerre des ligueurs bretons : Jamais, non jamais, la génisse ne s’alliera au loup. Les auteurs dramatiques secondaient activement l’élan national donné par les chanteurs populaires ; aussi est-ce l’époque florissante du théâtre breton : le nombre de mystères et d’autres pièces du même genre qui nous restent dépasse cent cinquante. »

Ce fut vers ce temps (1577) que naquit Michel Le Nobletz de Kerodern, le dernier apôtre de l’Armorique, celui qui devait étendre et diriger le mouvement national. Les chants religieux qu’il composa en langue bretonne devinrent si populaires, dit M. de La Villemarqué, qu’on n’entendait autre chose à la campagne, parmi les cultivateurs et les prêtres ; dans les maisons, parmi ceux qui travaillaient ensemble à faire des filets, et sur la mer parmi les mariniers. Il fut inhumé dans l’église de Lochrist, près du Conquet.