» Si, comme je devais y compter, lorsque je me suis engagé à traduire le Nouveau-Testament, j’avais pu me voir aider dans l’impression par M. David Jones, qui compte venir passer quelque temps à Angoulême, combien me serais-je épargné d’observations, combien plus de régularité aurais-je mis dans ma traduction ! Mais si l’on réfléchit que je me suis trouvé absolument seul, à plus de cent lieues de la Bretagne que j’ai quittée moi-même depuis vingt-quatre ans, on aura quelque indulgence pour moi, surtout si l’on se fait une idée du grand désir que j’avais de donner une traduction littérale, autant que pouvaient le permettre les entraves multipliées qui se rencontrent dans la langue bretonne lorsqu’il s’agit de rendre la concision de quelques phrases latines.
» Quelque jour peut-être, Dieu inspirera quelque Breton plus en position que moi de bien faire, et l’on verra une meilleure traduction du Nouveau-Testament. Mais je ne serai plus pour m’en réjouir.
» Angoulême, 22 Décembre 1827. »
Dans son savant Essai sur l’Histoire de la Langue Bretonne, M. Th. Hersart de La Villemarqué, aujourd’hui membre de l’Institut, prenant pour guides l’histoire et les faits, a dit sur cette langue, sur son passé et sur son présent, tout ce qu’il y avait à en dire. Malgré cela, ou plutôt à cause de cela, nous donnerons un court résumé de cet intéressant travail, que tout Breton devrait connaître.
Dans les campagnes de la péninsule armoricaine, Finistère, Morbihan et Côtes-du-Nord, on parle une langue différente de celle du reste de la France. En Angleterre aussi, un idiome autre que celui du peuple anglais est parlé par les habitants du pays de Galles, de l’Irlande et de la Haute-Écosse. Les peuples de ces derniers pays s’entendent entr’eux, et peuvent, à la rigueur, comprendre les habitants de la péninsule armoricaine.
De ces faits on a conclu, avec quelque raison, que les Bretons de France, les Gallois, les Irlandais et les montagnards de l’Écosse appartiennent à une même famille primitive.