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Adlennet eo bet ar bajenn-mañ
III
PRÉFACE

laissanl à d'autres le soin de conclure : notre folk-lore d’intimité n’était pas si doctrinaire.

Nous n’avons été intraitables que sur un seul point : nous n’avons plus reconnu comme populaire une mélodie qu’on aurait soutenue d’un accompagnement. Les chansons du peuple étant un bien commun, c’est le droit d'un musicien d’en prendre sa part. Il en va de même en poésie. M. Leconte de Lisie a rencontré dans les origines bretonnes le sujet de son « Jugement de Komor » ; ce Jugement, d’une si tragique beauté, est devenu autre chose que la légende : mais nous nous félicitons que le grand poète ait tiré de l’antique récit cette œuvre littéraire. Notre ami Gabriel Vicaire vient de donner un exemple non moins éclatant dans « le Miracle de saint Nicolas ». Il est permis au musicien de traiter de la sorte les mélodies primitives ; mais celles-ci renonceront, du même coup, à toutes leurs revendications particulières : une fois touchées par une harmonisation et partant remaniées, elles sont atteintes dans leur essence, elles cessent d’être impersonnelles et elles perdent leur caractère populaire.

J'ose donc livrer au public ces chansons de Bretagne et ces airs de danse, tels que je les tiens des bardes et des sonneurs. De peur que je n’aie pas l’art de les présenter, je laisserai ces naïves mélodies dans leur pureté d’hermine, sous leur exotisme, et je les garderai de toute parure d’emprunt. Quelques-unes joyeuses comme les cloches de l'angélus, presque toutes mélancoliques comme les fées nocturnes de nos plages, tremblanles et fugitives comme les mouëttes qui battent des deux ailes en prenant leur vol vers le large, telles vous les avez le premier accueillies et aimées ; j’ai voulu encore une fois vous redire, mon cher Bouchor, combien vous en est reconnaissant

Votre
N. Quellien.
Paris, janvier 1889.